Freepik jeune enfant maltraite par parent ceinture min

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Alors que le gouvernement de la Communauté française vient d’adopter un décret interdisant l’utilisation de violences envers les enfants dans tous les secteurs travaillant avec des enfants en Fédération Wallonie-Bruxelles, l’État fédéral est à la traine : la Belgique est l’un des derniers pays européens à ne pas encore être dotée d’une loi à ce sujet [1]. Pourtant, elle a été rappelée à l’ordre par de multiples instances internationales et des propositions concrètes ont été avancées par la société civile ces 20 dernières années. Défense des Enfants International Belgique (DEI-Belgique) a mis l’État belge en demeure : il doit démontrer sa volonté d’adopter une loi pour protéger les enfants contre les violences dans l’éducation en montrant des progrès dans ce sens d’ici le 20 novembre, journée internationale des droits de l’enfant, sinon l’organisation saisira la justice.

Des violences encore très utilisées dans l'éducation

« Une bonne fessée n’a jamais fait de mal », « j’ai reçu des claques dans mon enfance et je vais très bien aujourd’hui » … sont des idées reçues régulièrement entendues. Et pour cause, les violences physiques et psychologiques sont encore monnaie courante en Belgique, de la part des parents et des professionnel·le·s de l’éducation. La moitié des personnes interrogées[2] considère adapté de « mettre une petite claque » à son enfant et un quart donnerait une fessée dans des cas exceptionnels[3] : c’est ce qui ressort d’un sondage réalisé en mars 2020 sur un échantillon représentatif de 2013 personnes de 18 à 75 ans en Belgique. 20% des répondant·e·s jugent que tirer les oreilles, pincer, priver de repas, enfermer dans la cave et utiliser régulièrement un surnom insultant sont des « sanctions appropriées »[4].

Pourtant, les violences dans l’éducation ont largement été prouvées comme étant néfastes pour la santé physique et mentale de l’enfant : retards de développement, tendance accrue à adopter des comportements agressifs et antisociaux, troubles psychologiques… sont parmi les conséquences qui surgissent à court et à long terme[5].

La Belgique à la traine, les citoyen·ne·s en faveur d'une loi

La communauté française fait sa part du travail : son gouvernement vient d’adopter un décret qui interdit l’utilisation de violences envers les enfants dans tous les secteurs travaillant avec des enfants en Fédération Wallonie-Bruxelles… Un exemple que le fédéral devrait suivre.

La Belgique est l’un des derniers pays européens à ne pas encore avoir adopté une loi interdisant les punitions corporelles et autres formes de traitements dégradants dans le cadre de l’éducation… Pourtant, l’État a été rappelé à l’ordre de nombreuses fois pour ne pas respecter les engagements internationaux auxquels il est lié : Convention internationale des droits de l’enfant, Convention européenne des droits de l’Homme, Charte sociale européenne…

Dans notre pays, le cadre législatif est méconnu : 7 répondant·e·s sur 10 ne savent pas ce qui est autorisé ou non en matière de sanctions dans l'éducation des enfants[6]. Par contre, 85% de la population sondée est favorable à l’adoption d’une loi éducative plutôt que punitive, et dont le contenu soit expliqué[7]. Les citoyen·ne·s sont prêt·e·s, qu’attend l’État ?

L'Etat belge sommé de légiférer

De nombreux acteurs de la société civile travaillent depuis plus de 20 ans pour sensibiliser les décideurs·euses politiques et inciter l’État belge à légiférer. DEI-Belgique collabore étroitement en ce sens avec notamment l’Institut Fédéral des droits humains, la Commission nationale des droits de l’enfant, le Délégué Général aux droits de l’enfant, la Kinderrechten Commissaris, l’Observatoire de l’enfance, de la jeunesse et de l’aide à la jeunesse…

Durant la législature actuelle, deux propositions de loi ont été déposées au Parlement et de nombreux·euses expert·e·s, ont été auditionné·e·s par la Commission justice de la Chambre, dont Benoit Van Keirsbilck, directeur de DEI-Belgique et membre du Comité des droits de l’enfants des Nations Unies… Malgré les espoirs entrevus, la situation reste bloquée.

Étant donné l’absence d’avancées au niveau fédéral, DEI-Belgique a mis l’État belge en demeure de démontrer sa volonté d’adopter une loi d’ici le 20 novembre 2023, journée internationale des droits de l’enfant, faute de quoi l’association saisira la justice pour l’obliger à légiférer pour protéger les enfants.

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[1] https://endcorporalpunishment.org/countdown/

[2]https://www.dei-belgique.be/index.php/nos-publications/rapports/send/37-rapports/456-violence-dite-educative-ordinaire-resultats-de-l-etude-des-opinions-et-comportements-de-la-population-belge.html

[3] Ibidem

[4] Ibidem

[5] Voir notamment:  Kai-D. BUSSMANN, C. ERTHAL, et A. SCHROTH, Effects of Banning Corporal Punishment in Europe: A Five-Nation Comparison, 1ère edition,2021. / Commission nationale pour les droits de l’enfant, Interdire expressément les violences dites éducatives : une obligation juridique pour la Belgique,  avril 2018, consultable sur: www.ncrk-cnde.be, End Violence Against Children, Corporal punishment of children: summary of research on its impact and associations, octobre 2021, consultable sur: www.end-violence.org / End Corporal Punishment, une initiative du Global Partnership to End Violence Against Children : https://endcorporalpunishment.org/fr/research/

[6] https://www.dei-belgique.be/index.php/nos-publications/rapports/send/37-rapports/456-violence-dite-educative-ordinaire-resultats-de-l-etude-des-opinions-et-comportements-de-la-population-belge.html

[7] Ibidem