Actualités / Anciens articles / Publication de l’Avis de la Commission Nationale pour les Droits de l’Enfant (CNDE) sur le rapatriement des enfants belges des zones de conflit

Publication du 21/06/19

 

 

Contexte


Selon les chiffres de 2018 repris dans l’Avis de la CNDE, pas moins de 162 enfants liés à la Belgique1 sont encore présents en Iraq et en Syrie. Les enfants qui ont pu être localisés, vivent pour la plupart confinés dans des camps de prisonniers ou de réfugiés et font face à des conditions de vie particulièrement précaires. D’autres ont emprunté le chemin de l’exil avec ou sans leurs parents, et sont confrontés aux violences et dangers permanents de la route.

Des dizaines d’enfants ont déjà perdu la vie ces dernières semaines dans ces camps ou sur la route. Il plus que temps de les protéger et de les sortir des zones de conflits.

Ces enfants, dont la majorité a moins de 6 ans, sont particulièrement vulnérables et doivent être considérés comme de véritables victimes du conflit. En faisant primer des considérations de nature sécuritaire2, ce sont les droits fondamentaux de ces enfants qui sont violés. Pour tous ces enfants, qu’ils soient accompagnés, qu’ils aient perdu leurs parents ou qu’ils en aient été séparés, l’extraction des zones de conflit et le rapatriement vers la Belgique sont des nécessités absolues.

Il est urgent de localiser et de rapatrier tous ces enfants en Belgique ainsi que de les protéger efficacement de toute violation de leurs droits.

 

L’avis de la CNDE


Le 13 mai dernier, la Commission Nationale pour les Droits de l’Enfant (CNDE) a rendu public son avis concernant le rapatriement des enfants liés à Belgique. Pour la CNDE, leur statut d’enfant ainsi que la prise en compte des graves violations de leurs droits doivent être considérés en priorité. En effet, il est important de rappeler que jusqu’à ses 18 ans, chaque enfant est considéré comme tel aux yeux du droit international. De fait, chaque enfant n’ayant pas atteint sa majorité doit être pris en charge et protégé efficacement contre toute atteinte au respect de ses droits fondamentaux

La CNDE souligne ainsi que,

 

« [...]les enfants associés à des conflits armés sont avant tout des enfants quel que soit leur âge ou leur degré d’implication supposée dans le conflit armé. Ils ont été exposés à des violences extrêmes et des conditions de vie inhumaines. Ces enfants sont particulièrement vulnérables et doivent en premier lieu être considérés comme des victimes de graves violations de leurs droits. »

 

 

À ce titre, la CNDE expose 5 recommandations pour assurer le prompt rapatriement de ces enfants et la protection de leurs droits par l’État Belge. En tant que signataire de la Convention internationale des droits de l’enfant (CIDE), la Belgique se doit de faire respecter et appliquer l’intérêt supérieur de l’enfant là où elle a juridiction. L’intérêt supérieur de l’enfant se doit être le critère central des préoccupations de l’État concernant ces enfants : ni l’apatridie, ni le maintien des enfants dans les zones de conflits ne sont compatibles avec cette condition fondamentale.

 

La CNDE recommande donc à l’Etat belge :

 

a) « D’élaborer et de mettre en place des mécanismes permettant de repérer
les enfants qui ont été impliqués dans un conflit armé ou touchés par un
conflit armé, y compris les enfants demandeurs d’asile et migrants ;

 

b) De faciliter le rapatriement rapide de tous les enfants belges et, lorsque
cela est possible, de leur famille, quel que soit leur âge ou leur degré
d’implication supposée dans le conflit armé, […] ;

 

c) De veiller à ce que les enfants concernés soient considérés comme des
victimes de traite dans le contexte de l’exploitation dans un conflit armé
à des fins criminelles, […], à ce qu’ils soient protégés contre les
représailles et les nouveaux recrutements et à ce qu’ils bénéficient des
services d’aide, de réadaptation et de réinsertion nécessaires, y compris
un soutien psychosocial et une aide juridique ;

 

d) De faire en sorte que les enfants ayant affaire à la justice jouissent de
toutes les garanties d’un procès équitable, conformément à l’article 40
de la Convention, et qu’ils ne soient pas stigmatisés pour avoir pris part
à des activités illicites dans lesquelles ils ont été contraints de s’engager ;

 

e) De solliciter l’assistance d’entités des Nations Unies telles que l’Office
des Nations Unies contre la drogue et le crime, le Haut-Commissariat des
Nations Unies pour les réfugiés et l’Organisation internationale pour les
migrations pour repérer et aider les enfants victimes de traite dans le
contexte des conflits armés. »

 

Ces recommandations doivent impérativement être prises en compte par l’Etat pour que les enfants qui subissent les violences et privations engendrées par la guerre, puissent retrouver des conditions de vie propices à leur leur survie, leur développement et leur bien-être.

 

Des rapatriements au compte-gouttes


À l’heure actuelle, seulement une dizaine d’enfants ont pu être rapatriés en Belgique. Malgré la pression des universitaires3 et des associations de défense des droits de l’enfant4, ces rapatriements restent à l’heure actuelle trop peu nombreux.

 

Le 13 juin dernier, un accord de principe a été signé par la Belgique pour le rapatriement de six enfants vivant seuls dans l’enfer des camps au Nord de la Syrie5. C’est une belle avancée pour ces enfants qui vont pouvoir retrouver une vie normale, toutefois cela reste largement insuffisant pour la centaine d’enfants vivant encore au coeur du conflit. Ces enfants ont droit à une enfance normale et à une nouvelle vie libre de toutes violences et privations.

Ces enfants présents en zone de guerre sont particulièrement vulnérables à la violence, aux exploitations ainsi qu’aux pénuries sanitaires et alimentaires : de telles conditions de vie imposées aux enfants ne peuvent être tolérées.

 

 

Retrouvez ici l’Avis de la CNDE dans son intégralité

 

 Pour plus d’informations, retrouvez le positionnement de DEI-Belgique sur le rapatriement des enfants belges affectés par le conflit armé en Irak et en Syrie

 

 

 

1. Cette appellation regroupe aussi bien les enfants de nationalité belge que les enfants ayant droit à la nationalité du fait de la citoyenneté belge d’un de leurs parents.2. Organe d’Avis de Commission Nationale pour les Droits de l’Enfant, Avis du 13 mai 2019 sur le rapatriement sans délais tous les enfants belges et tous ceux relevant de sa juridiction des zones de conflits armés en Syrie et en Iraq pp.4
3. RTBF « 150 universitaires réclament le rapatriement des enfants de djihadistes » https://www.rtbf.be/info/belgique/detail_150-universitaires-flamands-reclament-le-rapatriement-des-enfants-de-djihadistes?id=10216886
4. RTBF « "Il faut rapatrier les enfants belges de Syrie le plus vite possible" » https://www.rtbf.be/info/societe/detail_il-faut-rapatrier-les-enfants-belges-de-syrie-le-plus-vite-possible?id=10182249
5.RTBF « Retour prochain vers la Belgique pour 6 enfants de jihadistes » https://www.rtbf.be/info/belgique/detail_retour-prochain-vers-la-belgique-pour-6-enfants-de-jihadistes?id=10245014